Connaître le potentiel de ses fourrages
Nathalie GENTESSE, M.Sc., agr.,Prendre le temps d’observer, de sentir et de toucher votre aliment principal vous donnera déjà une bonne idée du potentiel de production que vos vaches peuvent en tirer.
Le fourrage que vous récoltez, ce n’est pas juste du foin ou de l’ensilage quelconque. Il s’agit en fait d’aliments qui permettront de nourrir vos vaches laitières pendant toute l’année. La valeur annuelle réelle des fourrages consommés par une vache laitière est d’environ 1000$/an. Vous ne penseriez jamais à acheter un supplément ou un mélange protéique sans d’abord être sûr de sa qualité ou sans en connaître les caractéristiques telles que l’analyse en protéine, en minéraux, la texture,… De même, il est crucial d’évaluer les caractéristiques de votre ensilage et le potentiel de production de lait qui y est associé.
Différentes méthodes, plus ou moins scientifiques, peuvent être utilisées afin d’évaluer la qualité des ensilages. Ça commence par une bonne utilisation de vos yeux, votre nez et vos mains. Prendre le temps d’observer, de sentir et de toucher votre aliment principal vous donnera déjà une bonne idée du potentiel de production que vos vaches peuvent en tirer. Y a-t-il des portions moisies ? Si oui, il peut y avoir développement de mycotoxines. Évitez de servir cet ensilage altéré et peu nutritif ou, à tout le moins, évitez que les animaux les plus sensibles comme les vaches en début de lactation y aient accès.
Est-ce que l’ensilage sent bon ou l’odeur reste-elle imprégnée sur vos mains toute la journée ? Une mauvaise odeur signifie que la fermentation ne s’est pas déroulée normalement. Des ensilages trop humides ont tendance à développer des odeurs butyriques ou de vinaigre. Des ensilages trop secs sentiront plutôt le tabac. Est-ce que l’ensilage chauffe ? Permettez-vous à l’air d’entrer dans l’ensilage 24h avant de le servir ? Vous pouvez prendre la température de l’ensilage entreposé, préparé à l’avance ou servi en avant des animaux afin d’en évaluer la stabilité. La température de l’ensilage ne devrait pas dépasser de plus de 20 ºF la température ambiante. Quelle est la texture ou la taille des particules de l’ensilage ? Le séparateur de particule de Pennstate permet de répondre à cette question. Certains vont jusqu’à mesurer le pH avec des tests rapides afin d’évaluer le succès de la fermentation.
L’homogénéité d’un ensilage, tant du point de vue des espèces récoltées, du taux d’humidité, de la compaction et de sa texture est très importante pour la vache. Une variation de ces éléments entraîne différents taux de sucres, d’oxygène et d’eau dans le fourrage résultant en une fermentation inégale de la masse. Or, le rumen requiert la monotonie pour bien performer et produire la protéine microbienne et les acides gras volatiles qui serviront pour la production de lait. Pour un rumen efficace, il faut donc un ensilage stable et constant.
Déjà, après ces observations, vous avez probablement une bonne idée de la qualité réelle de l’ensilage. Le laboratoire pourra ensuite analyser les nutriments. Pour plus de détails, vous pouvez demander une évaluation de la digestibilité de la fibre. En cas de problèmes dans le troupeau, un profil de fermentation ou de mycotoxines, pourrait donner des pistes de solution. De cette façon, vous aurez une meilleure compréhension de l’aliment que vous entreposez ainsi que du potentiel de production de lait que vos vaches pourront en tirer.
Finalement, une fois la récolte des ensilages faite au meilleur de votre capacité et de la météo, la fermentation évolue pendant quelques semaines pour en faire un produit supposément stable. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. Des bris d’équipement, ou de la structure d’entreposage peuvent faire en sorte que votre ensilage stable se remette à vivre, vous obligeant à nouveau à réévaluer son potentiel de productivité de lait.